Conseils

Ne jouez pas au « bullshit bingo » dans votre mission d’entreprise

L’utilité de rédiger une mission d’entreprise est un vieux débat qui a été ravivé dernièrement par l’essor du purpose, du meaningful marketing et de la durabilité. Pourquoi ce regain d’intérêt, comment s’y prendre et quels sont les écueils à éviter pour que votre mission d’entreprise soit vraiment pertinent ?

« Wouter, tu connais le bullshit bingo ? » Cette question m’a pris totalement au dépourvu. J’étais en train de me demander, avec un ami de longue date, si les personnes qui aiment parler le jargon du management comprennent elles-mêmes ce qu’elles disent. Mon interlocuteur m’a alors avoué son habitude de jouer au bingo chaque fois qu’il entendait, en réunion, des termes que l’utilisateur serait selon lui incapable d’expliquer. Je ne sais pas s’il a également joué à ce bingo avec des collègues et de quelle manière, mais les cases de son bullshit bingo contiennent en tout cas des termes comme agile et lean, mais aussi KPI, bottom line, challenging, commitment, no brainer, stakeholder, ownership et mission statement…

Maquillage de mission

Dans cette liste, je pense que le terme anglais mission statement (mission d’entreprise en français) est un bon exemple et, qui plus est, particulièrement d’actualité. C’est un bon exemple parce que le risque de dire des « conneries » dans un tel document est assez élevé. Bien sûr, on peut aussi en faire quelque chose de formidable, mais malheureusement, on l’utilise encore trop souvent comme du maquillage : on n’est pas tout à fait sûr de la mission de son entreprise, mais cela fait très professionnel de dire que l’on dispose d’un tel document.

Cette discussion n’a rien de neuf. En tapant « mission statement » dans Google, vous obtiendrez sans peine une liste de penseurs du management qui remettent en cause son utilité. Mais ce débat a été ravivé dernièrement par l’attention accrue portée aux questions de durabilité. En effet, à l’heure où de plus en plus d’entreprises lient leur raison d’être à l’impact environnemental, à la diversité ou à d’autres problèmes de société, elles ressentent le besoin de s’en expliquer au mieux sur leur site web, sur leur page LinkedIn, dans leurs brochures commerciales, etc. Et c’est alors que la mission d’entreprise pointe le bout de son nez. Dans le meilleur des cas, un tel exercice oblige une entreprise à réfléchir en profondeur à sa valeur ajoutée, ses produits, ses services et ses groupes cibles.

Comment définir et rédiger sa mission d’entreprise ?

Il s’agit souvent de questions qui ont déjà été étudiées attentivement lors d’une réflexion stratégique. Le tout maintenant est de traduire les réponses en un texte suffisamment détaillé et transparent, mais qui ne se perd pas dans une abondance de détails et ne parle pas un langage incompréhensible pour le public. Si vous parvenez à éviter ces écueils, vous réduirez sérieusement la probabilité de jouer au bullshit bingo. Dans les lignes qui suivent, nous vous proposons quelques pistes pour mener à bien cet exercice.

1. Ditch, dare, do

Au risque de créer nous-mêmes des termes « à la con » supplémentaires, nous faisons appel à l’écrivain américain William Aruda, auteur du best-seller « Ditch, Dare, Do ». Dans cet ouvrage, il donne des conseils sur l’image de marque personnelle, mais son approche est aussi un bon modèle pour rédiger une mission d’entreprise. Expliquez la valeur que vous voulez procurer, à qui et dans quel but. Ce dernier point, en particulier, doit être percutant, comme l’affirmation « nous voulons du chocolat sans esclavage » de Tony’s Chocolonely. Vous restez encore sur votre faim ? Dans ce cas, le modèle du Cercle d’or de Simon Sinek reste un excellent point de départ.

2. Ne le rédigez pas à la va-vite un vendredi après-midi.

La mission d’entreprise n’est pas un document uniquement destiné à la direction. Chaque employé doit le connaître et y adhérer. Sinon, votre mission restera lettre morte dans 90 % de l’entreprise. Dans cette vidéo, vous verrez comment cela peut vite donner des situations totalement absurdes. Prenez donc le temps d’obtenir le soutien interne nécessaire.

3. Faites le test « bullshit »

Une fois que votre réflexion stratégique a été traduite en une mission d’entreprise et a obtenu l’aval en interne, évitez de la publier immédiatement en ligne, mais vérifiez d’abord si elle n’a pas été trop émoussée en cours de route. Révèle-t-elle le cœur de votre activité ? Comprenez-vous pourquoi cette mission vous rend différent des autres entreprises ? Cette mission vous touche-t-elle, est-elle liée à ce qui vous passionne ou booste votre énergie mentale en tant qu’entrepreneur ? Est-elle concrète, claire, dotée d’une forte personnalité et, si possible, concise ? Et surtout : est-elle susceptible de provoquer aussi des réactions négatives ? Car si personne ne peut s’opposer à une mission du genre « nous voulons être à l’écoute du client », celle-ci manque cruellement de précision. Osez donc prendre parti !

La réponse à toutes les questions ci-dessus est-elle positive ? Dans ce cas, vous ne risquerez pas de raconter des conneries lorsque vous parlerez à quelqu’un de votre mission d’entreprise ! La dernière chose qu’il vous reste à faire est d’en soigner le style…

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